dimanche 19 février 2012

RAFFI KAISER ART ISRAELIEN par Shoshana Saskia Cohen Tanugi

L’exceptionnelle beauté des paysages de déserts et de montagnes

Raffi Kaiser est né en 1931. Il est formé dès son jeune âge par Israël. Il vit depuis 30 ans entre Europe, Chine, et Japon.  Traversant à pied les déserts et les montagnes, armé de ses cartons, ses crayons et son encre, il forge pour le Proche Orient, un patrimoine exceptionnel de paysages à partir des techniques traditionnelles issues du patrimoine japonais.  Monochromes sépias à la pointe carbone ou noir à l’encre de chine, le tracé est toujours précis,  laissant une large place à la blancheur de l’espace vide. Sa relation avec le paysage passe par la concentration, le silence et la beauté. Si le monde contemporain est de tout son instinct dirigé vers l’avenir et la rapidité, celui de Raffi Kaiser se tourne vers l’éternité. Il appartient à l’élite de l’histoire de l’art.

Depuis la critique moderne, appartenir à l’élite implique toujours une relation au pouvoir et aux galeries marchandes. L’art occidental tente à penser produit et la politique culturelle occidentale implique une relation qui suggère de diffuser l’œuvre achetée par l’état, comme la manifestation d’une image publique et représentative d un collectif. Les grands chantiers représentent l’état.  Les grandes œuvres représentent une partie ou l’histoire du peuple. C’est un devoir de l’état de conserver les meilleurs productions de ses élites artistiques, de proposer aux générations à venir un patrimoine. Le monde contemporain se tourne vers le futur : l’art contemporain cherche donc un des reflets de ce futur à travers l’utilisation des nouveaux matériaux, silicone, plexiglas où électronique. Un contre mouvement se manifeste par un langage artistique ayant trait à l’immobilité, à la traduction esthétique d’une conception morale du monde.

Les oeuvres de Kaiser reflètent une expérience artistique nourrie aux plus grands mouvements spirituels de l’extrême orient. Sa recherche basée uniquement sur le panorama, le paysage - fontaines vives, montagnes, brouillards et neiges sur les volcans - rappelle par la pureté du trait et de la ligne, les œuvres antiques du Japon mais repensées après Jackson Pollock.  L’américain pose sa toile au sol et projette la couleur pour atteindre le rythme d’une écriture chevronnée, l’israélien répond par 30 mètres de dessins défilant comme une méguila sur de grands panneaux. La ligne d’une montagne, prise entre l’immensité vide du brouillard défile sur plus de 30 mètres, et devient un panorama du Néguev. Avec ses pierres, ses arbres secs et ses silences.  Le conservateur en chef du Musée d’art moderne de Kamakura,  Yamanashi Toshio écrit au sujet de l’artiste israélien : «  En 1991  Raffi Kaiser, poursuit sa quête en extrême orient  en parcourant à pied les régions montagneuses du Japon…Pendant ce voyage de près d’un an, l’art de Raffi Kaiser connaît un nouveau développement.  Lorsqu’en 1993, j’ai pu voir à Kyoto, le résultat de ce travail, je remarquais la part encore plus importante prise par les espaces blancs…telle qu’on la retrouve dans la peinture chinoise mais réinterprétée dans un langage plastique qui avait atteint sa pleine maturité et était empreint de profonde originalité.»1

Ce sont ses œuvres créees à partir de  marches à travers le désert du Néguev qui ont été choisies par Daniel Jacoby, l’avocat de l’écrivain dissident soviétique Kouznetzov et auteur de l’ouvrage consacré à l’affaire Chtcharansky en 78,  pour illustrer ses carnets de poèmes courts de 1985.
« Rocher sentinelle, que guettes-tu ?» accompagne un dessin sépia exceptionnel de passages entre pierres et roches du sud d’Israel.2

Durer, Leonardo, Michel Ange accordaient une telle importance au dessin que certains étaient cachés voir brûlés pour ne pas être connus du public.
Les monochromes de Kaiser sont les œuvres magistrales de l’art contemporain israélien.

Biographie


Né à Jérusalem en 1931, Raffi Kaizer a étudié l’art à l’école israélienne de Tel Aviv
Fine Art School, puis à Paris à l’Ecole des Beaux Arts et enfin à l’Accademia di Belle Arti de  Florence.
De 66 à 67 il vit en Italie et produit une œuvre influencée par les peintres de Toscanes, de la Renaissance, Ucello, Piero de la Francesca,  Simone Martini, Leonardo…

 Dès 67 le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris lui attribue le prix du « Meilleur artiste étranger.»
A partir de cette date, il présente les paysages d’Israel dans les expositions internationales : en 68, à Bruxelles, en 69 au Musée Saginawa dans le Michigan, en 70 à la biennale de Bradford, en 75 au Musée Juif de New York.
en 77 au Grand Palais, à Paris et dans les musées internationaux,  au Canada ( Ottawa 1978 )  au Festival d’art Israélien de Berlin en 79,ses oeuvres sont présentées à l’exposition internationale de Bâle en Suisse,  dans les expositions de groupe, de Stuttgart, ( 1988)  en Chine, à Cologne, au Japon ( 2000, Tsumari Art Triennial, Nujgata) …


Musée National des Arts Asiatiques, Guimet



L’exposition la plus remarquable, saluée comme majeure pour l’art contemporain, fut organisée en 1990 par le Musée National des Arts Asiatiques de Paris,  le Musée Guimet.  Comme le cycle des nymphéas de Monet, composé de 12 panneaux de deux mètres de hauteur, Raffi Kaiser compose un paysage  qui se déroule en une exceptionnelle méguila sur 50 mètres de long, où la pointe d’un crayon révèle la ligne des monts Huangshan,  les paysages de Chine dans le silence et le brouillard, dans la lumière blanche et le vide. Le conservateur du Musée Guimet, Jacques Giès garde souvenir de l’israélien  :
« Le musée Guimet dont la vocation est de transmettre la connaissance des arts d’Asie a dérogé, à cette occasion, au principe qui exclut la présentation d’œuvres d’artistes vivants, en raison du caractère exceptionnel de cette œuvre. Car le Huangshan vu par le peintre Kaiser n’est pas un simple reflet de la peinture chinoise.»3 En 89, la critique d’art  Danièle de Temmerman publie « Qu’il dessine des montagnes, des cascades ou des grands espaces, Kaiser recherche l’essentiel, il nous donne à lire son éblouissement devant le spectacle du monde. »   Kaiser œuvre d’une manière exceptionnelle a faire comprendre le temps, le silence, la force du monde intérieur de l’homme, la puissance et la fluidité d’un paysage dont la moindre nuance module l’émotion.
«  Voici quelques années, la nécessité de faire le point s’imposa  à moi. Un besoin violent de solitude.  Il me fallait changer d’univers, me couper de tout et de tous, retrouver le silence. Le désert d’Israel que j’aimais tant m’apparut comme un lieu idéal de retraite et d’approfondissement.. Je n’ai rien d’un mystique, je voulais être seul et réfléchir. J’ai commencé à dessiner ce que je voyais.  Progressivement, je n’étais plus un visiteur mais une parcelle. De retour à l’atelier, je continuais de dessiner de vastes paysages. Une étape à travers le désert prit la forme d’un rouleau de 10 mètres… Spontanément j’ai retrouvé la ligne de la tradition chinoise. Ma conception de l’espace s’identifie à celle de la tradition chinoise, lignes, taches, silences, espaces vides. Pour avoir mis mes pas dans ceux des maîtres chinois, je partis en Chine. »
En souhaitant une prochaine exposition de ses œuvres au Musée d’Israel ou à celui de Tel Aviv.
www



1 Raffi Kaiser – Paysages des origines -  Catalogue de l’Exposition du Musée  de Cologne – Romisch Germanisches Museum -  1999 2000 –p
2 Rouleaux – Jacoby / Kaiser  - Editions du regard – 1985




J’ai découvert ses dessins sur la Chine, il y a 20 ans, pour l’organisation de son exposition au Musée Guimet de Paris. Son travail fait parti des plus grands moments de l’histoire de l’art israélien. Bouleversant au même niveau, l’idée de la profondeur humaine, que les œuvres de Diego Giacometti dans son atelier parlent de la vie et de l’art du XX eme siècle. J’ai pu découvrir à Kyoto, son travail à la Nomura Cultural Foundation où il proposait un regard sur les paysages du Japon. Il était le premier peintre invité à rester 12 mois au Japon par la Fondation. Les œuvres de cet artiste israélien sont considérées comme faisant parti du patrimoine international de l’art d’extrême-orient.

Souvenirs :
 J’ai découvert ses dessins sur la Chine, il y a 20 ans, pour l’organisation de son exposition au Musée Guimet de Paris. Son travail faisait déjà parti des plus grands moments de l’histoire de l’art israélien. Bouleversant au même niveau, l’idée de la profondeur humaine, que les œuvres de Diego Giacometti. J’ai pu découvrir à Kyoto, son travail à la Nomura Cultural Foundation où il proposait un regard sur les paysages du Japon. Il était le premier peintre invité à rester 12 mois au Japon par la Fondation. Les œuvres de cet artiste israélien sont considérées comme faisant parti du patrimoine international de l’art d’extrême-orient.

Son œuvre ne traite ni de l’homme ni de l’animal, mais du panorama et de la nature. Il propose de long paravent traversés d’une ligne à l’encre, au crayon, confrontant l’ocre de la mine à la pâleur du support.



3 Jacques Gies – Catalogue du Musée National Guimet Collection des Arts d’Extrême Orient – 1990

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