mercredi 19 juin 2013

REMBRANDT par Shoshana Saskia Cohen Tanugi

REMBRANDT et LE MARIAGE JUIF


Rembrandt Van Rijn (1606-1669) qui excelle dans les scènes bibliques aux compositions en spirale, célèbres pour leur exceptionnel mouvement, leur clair-obscur et leur puissante évocation de la beauté morale des personnages représentés, fut un des peintres hollandais les plus proches de la communauté Juive d'Amsterdam.  Elève de Jacob Van Swanenburgh, il épousa la nièce de Van Uyelenburgh son marchand de tableau, qui lui fit rencontrer les savants Juifs de la ville. Tout le long de sa vie, il les a immortalisés dans différents portraits : comme celui d'Ephraïm Bueno conservé au Rijksmuseum, ou le Portrait d'un Jeune Juif de la collection Van Horne.  Il les représente également sous les traits des rois, comme le Roi Ozias de la collection Devonshire, ou David jouant de la harpe devant Saul. Il utilise encore des proches et des personnes issues de la communauté pour le magnifique Esther Assuérus et Aman du musée Pouchkine et pour le Festin de Balthazar conservé à Londres à la National Gallery portant les inscriptions en hébreu au dessus des coupes du temple de Jérusalem renversées.  Il présente également le Peuple d'Israël sous les traits des prophètes comme Jérémie pleurant sur la destruction de Jérusalem conservé Rijksmuseum, où un vieillard abattu de douleur, est accoudé sur un précieux tapis sur lequel sont déposés les trésors du temple. Il utilise le visage de sa propre mère pour présenter Hannah lisant la Torah. Il dépeint également les Juifs d'Amsterdam en héros bibliques : Jacob luttant contre l'ange, Jacob bénissant les fils de Joseph, ou dans sa peinture du mariage de Samson.

Il utilise la plume et l'encre de chine pour illustrer les portraits des Juifs d'Amsterdam : comme la Rencontre d'Abraham et Melchisédech, ou Abraham recevant les trois anges, Abraham bénissant Isaac. Les dessins des Adieux de Rebecca à ses parents, celui de David prenant congé de Jonathan, (cabinet des dessins du Louvre) ou celui de Daniel dans la fosse aux lions. La  gravure conservée à la Bibliothèque Nationale de Paris, représentant Le Triomphe de Mardochée confirme le lien fort qu'entretient le peintre avec la communauté issue d'Espagne et du Portugal. La communauté florissante d'Amsterdam à l'époque de Baruch Spinoza, si elle ne fut pas sensible aux publications de ses philosophes, elle sut néanmoins coopérer avec les peintres.
En effet Rembrandt avait choisi de vivre à proximité du quartier Juif. Il y installa sa famille et son atelier. Cette contigüité avec les familles établies dans le quartier est illustrée par une de ses œuvres principales : La Fiancée Juive, également appelée Mariage Juif ou Isaac et Rebecca, datant de 1665 et conservé au Rijksmuseum.  Dans cette œuvre, Rembrandt présente le sacré associé à la vie quotidienne. Rembrandt désire montrer l'humilité nécessaire au consentement de deux êtres. A l'instant de l'accord de mariage, les yeux d'Isaac et ceux de Rebecca ne se croisent pas. Les visages baissés sont emprunts de douceur et de gravité. Ce n'est pas une passion charnelle qui est représentée, mais  la pudeur et le respect évoqués par la grâce du futur couple. La beauté de la modestie et le raffinement de la retenue, la simplicité de l'effacement et la douceur de la réserve sont, pour Rembrandt, la peinture réaliste d'un véritable mariage Juif. Le jeu des mains des deux personnages, trace les quatre lettres du tétragramme.

Sources :
Marc le Bot Rembrandt et l'Orient éd. Flammarion 1990
Horst Herson Rembrandt et son œuvre éd. Hachette 1968

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